[S16] Piscine vs Eau libre en triathlon : même nageur, deux mondes

Je me souviens encore de la piscine de Montparnasse. J’avais environ six ans quand mon père m’a appris à nager dans le petit bassin. À force d’y aller ensemble, j’ai fini par rejoindre le bassin de 25 mètres. Et puis il y avait ce bassin olympique de 50 mètres que je regardais de loin, impressionnée, en me disant qu’un jour, moi aussi, j’irai nager avec les grands.

En parallèle, avec mes deux parents, on s’est souvent baignés en pleine nature – mer, rivières, lacs… En piscine ou en rivière, plonger, nager, se défouler, prendre des vagues, sentir les algues entre les doigts… J’ai toujours aimé l’eau. J’y ai passé des heures, sans jamais voir le temps passer.

Depuis toute petite, j’ai eu la chance de nager. Pas de manière incroyable, mais suffisamment pour borner à mon rythme, y prendre du plaisir, et surtout être à l’aise dans l’eau. Et ça, en triathlon, c’est un sacré atout !

Et si les deux partagent la même base – nager d’un point A à un point B – les exigences techniques, mentales et physiques sont profondément différentes. Comprendre ces écarts, c’est progresser, s’adapter, et mieux performer… sans se noyer dans l’inconnu (même si parfois, on se demande vraiment ce qu’il y a sous nous !).

  1. La flottaison : le facteur (trop) sous-estimé
  2. L’environnement : l’incertitude comme norme
  3. Les différentes eaux libres : Mer et lac
  4. Le mental : entre concentration et gestion du stress
  5. La stratégie de nage : adaptation et économie
  6. Conclusion : deux mondes, un seul objectif – être prêts partout

La flottaison : le facteur (trop) sous-estimé

En piscine, la densité de l’eau et sa température sont constantes. On sait comment on flotte, comment on se positionne, et comment notre corps va réagir à chaque virage. La combinaison est rare, voire interdite, donc notre flottaison dépend uniquement de notre gainage et de notre technique.

En eau libre, les choses se compliquent. L’eau douce nous porte moins que l’eau salée. Ajoutons une combinaison néoprène, et on gagne de la portance… mais aussi une contrainte de mobilité, notamment au niveau des épaules. Certains d’entre nous perdent de l’amplitude s’ils n’adaptent pas leur technique. Et si on passe d’un plan d’eau chaud à un lac de montagne à 16°C, bon courage : le choc thermique peut raidir les muscles, couper la respiration, voire déclencher une panique.

Le conseil : On ne le dira jamais assez, on ne teste pas une combinaison un jour de course ! Et on s’assure régulièrement de son état. En plus, travaillons la flottaison avec ou sans combi pour pouvoir nous adapter rapidement. Et surtout, ne négligeons jamais un bon échauffement avant de plonger dans l’eau froide.

L’environnement : l’incertitude comme norme

Nager en piscine, c’est comme courir sur une piste : tout est balisé, stable, mesuré. On a des lignes au sol, des murs tous les 25 ou 50 mètres, des repères visuels et sonores. On peut calibrer notre allure au mètre près.

En eau libre ? Pas de mur, pas de ligne, souvent pas de fond visible. Et surtout : du courant, du vent, des vagues, et des nageurs partout – sans parler des algues ou d’une méduse qui s’invite au passage. On apprend à gérer l’instabilité, l’imprévu, et à rester lucide.

Petite, je ne comprenais pas que ma copine n’ose pas sauter dans la rivière parce qu’elle ne voyait pas le fond : « et alors ? ». Sauf qu’en grandissant, après avoir vu des dizaines de films plus terrifiants les uns que les autres, j’ai commencé à comprendre. Et il m’a fallu parfois deux minutes pour lâcher prise quand mes pieds ont marché sur de la vase ou frôlé les algues. Persuadée qu’en dessous de moi, il y a les sirènes de Harry Potter ou des ragondins pour m’attaquer, quand j’ai peur, je souffle un bon coup et je me mets la plus en surface possible parce que les animaux ne viennent pas aussi haut.

Le conseil : Première chose, les animaux ont plus peur de nous que nous n’avons peur d’eux. Si on ne cherche pas les embrouilles, tout ira bien. Pour se préparer, intégrons du « chaos » dans nos entraînements : nageons en ligne droite sans repère en piscine, fermons les yeux sur quelques mètres, ajoutons du drafting, entraînons-nous au sighting (lever la tête pour repérer sa direction) toutes les 6 à 8 respirations. Bref, entraînons-nous à l’inattendu. Et surtout, entraînons-nous une fois de temps en temps en piscine publique à heure de pointe ! C’est le combat !

Les différentes eaux libres : Mer et lac

Nager dans un lac et nager en mer, c’est un peu comme courir sur un tapis roulant ou sur un sentier en montagne : ce sont deux expériences totalement différentes.

Le lac offre souvent une eau plus calme, sans marée, sans vague, avec un environnement plus “posé”. Mais cette tranquillité peut vite devenir trompeuse : l’eau y est parfois plus froide, plus sombre, et il peut être difficile de s’orienter sans reliefs autour.

En mer, c’est l’inverse : le sel augmente la flottaison, ce qui peut être agréable, mais il faut composer avec les vagues, les marées, le courant, et occasionnellement même les méduses ou les remous imprévus. L’eau y est fréquemment plus claire, mais aussi plus vivante, plus mouvante.

L’un demande du relâchement, l’autre de la vigilance. L’idéal ? S’entraîner dans les deux, parce que chaque milieu développe une autre facette de notre nage et de notre mental.

Le conseil en course : Si on nage en mer, bien s’hydrater en sortie, s’habituer à l’ingestion de l’eau de mer à l’entrainement, et se laver la bouche pour ne pas avoir le gout de sel.

Le mental : entre concentration et gestion du stress

La piscine peut être monotone, mais elle nous permet de nous concentrer à 100 % sur notre technique. En eau libre, notre cerveau est sursollicité : Où suis-je ? Est-ce que je dévie ? Est-ce que je respire trop souvent ? Pourquoi il fait noir sous moi ? Et ce truc qui m’a frôlé, c’était quoi ?

La charge mentale est énorme, surtout au début. Beaucoup d’entre nous, très à l’aise en piscine, peuvent se retrouver désarmés une fois dehors, à cause d’un stress mal géré. La clé, c’est l’habitude, la préparation mentale, et l’exposition progressive à des environnements variés.

Le conseil : Travaillons la visualisation avant une course. Répétons des sessions dans différentes eaux et conditions. Apprenons à gérer notre souffle même en situation inconfortable. Et surtout : continuons de nager dehors, même si la piscine est plus rassurante. Alors, on change de piscine régulièrement pour s’adapter aux environnements et aux gens, on fait des exercices de respirations en 2 – 3 – 5 – 7 temps, on sort dès que la température de l’eau le permets (et on en fait un pic-nique avec les amis au passage).

La stratégie de nage : adaptation et économie

En piscine, on peut se permettre une technique très académique : grande amplitude, glisse, rattrapé parfait. En eau libre, on nage souvent avec une cadence plus élevée, une amplitude légèrement réduite, et une recherche de stabilité dans les vagues. On vise l’efficacité plus que la pureté du geste.

Et puis il y a le drafting, cet élément clé en eau libre : se placer dans la vague d’un autre nageur pour profiter de l’aspiration. Illégal en piscine (sauf en courses par équipe), mais stratégique en triathlon. Cela demande une bonne lecture de course, un placement intelligent et la capacité à rester concentré au cœur du peloton.

Le conseil : Quand c’est possible, travaillons des séries en groupe, nageons côte à côte, testons différentes cadences. Au pire, nagez dans les pieds d’un inconnu à la piscine sans le toucher. Apprenons à modifier notre rythme pour accrocher un groupe ou en sortir sans nous griller.

Conclusion : deux mondes, un seul objectif – être prêts partout

Que l’on soit nageurs de bassin passionné ou aventurier aquatiques du week-end, en triathlon, on doit maîtriser ces deux environnements. La piscine reste notre meilleure alliée pour affiner la technique. L’eau libre, elle, nous apprend l’adaptation, la résilience et la lecture du terrain. Un peu comme le home trainer et la route.

Personnellement, je ne pourrais pas choisir entre les deux. L’une m’a appris la rigueur, l’autre la liberté. Ensemble, elles nous construisent comme nageurs, comme triathlètes… et surtout, elles nous permettent de garder ce plaisir de nager, partout, tout le temps.

Bisous!


Laisser un commentaire